Cantines scolaires : un défi de taille pour les communes


Damas Teuira, maire de Mahina.
MAHINA, le 28 mars 2017 - La restauration scolaire est au menu d'un séminaire organisé par le Syndicat pour la promotion des communes. Pendant deux jours, les maires des communes de Polynésie française sont réunis à Mahina afin d'échanger autour de la gestion et la tarification des cantines.

La cantine de demain se décide aujourd'hui. "La restauration scolaire n'est pas une compétence obligatoire pour les communes", a rappelé dans son discours introductif Damas Teuira, le maire de Mahina. En effet, si la loi impose aux communes d'assurer le fonctionnement des écoles primaires, celle-ci ne les oblige pas à mettre en place un service de restauration scolaire. Cependant, seules les mairies sont compétentes pour organiser ce service public.

"Les commune se sont saisies de ce service par nécessité", a continué le tāvana de Mahina. "Cela permet à de nombreux enfants d'avoir accès à un repas sain et équilibré au moins une fois par jour."

De nombreux maires s'accordent sur ce point. Le service de restauration scolaire est avant tout un service rendu à la population. "Je reste persuadé que pour certains enfants, le seul repas qu'ils ont de la journée, c'est celui de la cantine", affirme le maire de Hao, Théodore Tuahine.

44 maires ont décidé d'assurer ce service mais la méthode diffère d'une commune à l'autre. Véritable enjeu de santé publique, les maires s'attachent à distribuer des repas sains avec des produits locaux à leurs enfants. C'est en tout cas le défi que s'est lancé il y a cinq ans la commune de Rurutu.

"DES REPAS ÉQUILIBRÉS ET DE QUALITÉ"

A l'intérieur de la cuisine centrale de Mahina.
"Notre priorité est que les enfants mangent des produits locaux. Nous avons ces produits grâce aux producteurs du fenua et des pêcheurs ", confirme Julie Teuruarii, responsable de la cantine scolaire.

Dans les Australes, Rimatara fonctionne sur le même schéma. Agriculteurs et pêcheurs nourrissent les enfants de l'île. Depuis 2015, Rimatara a une cuisine centrale. C'est désormais la mairie qui a en charge la gestion et la fabrication des repas pour près de 280 enfants par jour. "La principale préoccupation de la commune est d'aider la population. Nous nous fournissons donc auprès des producteurs locaux, qui sont principalement les parents. Cela permet de réduire nettement les prix des repas", détaille Angie Li, en charge de la restauration scolaire auprès de la commune.

Avant que la commune ne possède sa propre cuisine centrale, les repas des écoliers étaient gérés par des associations. "Nous avons décidé de reprendre cela pour que toutes les écoles aient les mêmes menus, les mêmes produits et la même chance d'avoir des repas équilibrés et de qualité."

Ces deux exemples pourraient inspirer d'autres communes. Beaucoup de tāvana aimeraient fonctionner avec des produits locaux. C'est le cas du maire de Mahina, par exemple. i["Nous sommes actuellement en train de réfléchir à reprendre la cantine en régie au sein de la commune [la restauration scolaire est actuellement gérée par une association, NDLR]. Évidemment, nous aimerions aussi avoir des produits frais et locaux de nos agriculteurs, mais ce n'est pas évident pour une commune comme la nôtre." ]i

Quelle que soit la méthode, la restauration scolaire a un coût pour les communes. Une participation familiale est souvent demandée. Celle-ci n'est pas la même partout en Polynésie et peut varier selon les revenus des parents. "Un repas coûte 500 francs à la commune", explique Théodore Tuahine. "Nous demandons une participation de 100 francs à tout le monde. Certaines familles ne paient pas. La compétence de la restauration scolaire est une compétence déficitaire malheureusement. Mais c'est aussi une compétence à vocation sociale, on équilibre notre budget pour venir renflouer la caisse de la cantine scolaire."

Depuis le 1er janvier 2016, une prise en charge complémentaire des frais de cantine scolaire en faveur des enfants allocataires du régime de solidarité territorial (RST) a été instituée. Le montant du cumul de cette aide est plafonné à 500 francs par jour et par enfant allocataire.

Ces différents sujets seront débattus autour de tables rondes et d'ateliers pendant ces deux jours. À l'issue de ces rencontres, les maires auront une idée plus précise de ce que pourrait être la cantine de demain.

"On est passé de la cantine familiale à quelque chose de professionnel et réglementé"

Mihirangi Moeroa, chef de projet au Syndicat pour la promotion des communes, chargée de la restauration scolaire.

Pourquoi le SPC a-t-il décidé d'organiser ce séminaire ?


"Parmi les services publics, les cantines scolaires ont quasiment toujours existé sous des formes différentes. On a l'habitude d'avoir des cantines scolaires mais on n'a pas forcément constaté leur évolution. Cela demande du personnel formé, du matériel et des équipements. On est vraiment passé de la cantine traditionnelle familiale à quelque chose de professionnel et réglementé. Cela fait trois ans maintenant que nous travaillons avec les cadres communaux sur les coûts de la restauration scolaire. C'est un sujet qui est très riche."

Dans la gestion des cantines, le gros problème reste les impayés. Y a-t-il de nombreux repas impayés dans les communes ?


"Je pense qu'il y a une méconnaissance de la part des familles du coût réel d'un repas. Beaucoup de parents se demandent pourquoi ils doivent payer. Alors que, en fait, la commune dépense beaucoup plus que ce qu'elle demande en participation. Il y a une communication à mettre en place avec les familles puisque l'on voit que, dans certaines communes, les parents paient. C'est donc qu'il y a des moyens à exploiter pour que le système fonctionne."

Quels sont les bons élèves dans cette gestion de la restauration scolaire ?

"Il n'y a pas de bons ou de mauvais élèves. L'idée, avec ce séminaire, est de prendre exemple sur les réussites de chacun. Par exemple, la commune de Taputapuatea est en train de changer son système de tarification. Cela peut être un exemple de voir les étapes par lesquelles elle est passée pour arriver à cette nouvelle tarification. Il y a aussi l'exemple de Mahina, qui est en train de reprendre la restauration scolaire en régie… Aujourd'hui, 44 communes gèrent des cantines. Bientôt, il y en aura 45. Hikueru est en train de monter un projet."


Rédigé par Amelie David le Mardi 28 Mars 2017 à 17:22 | Lu 2101 fois